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XXIème Congrès du PCUS

Le 21e congrès du PCUS s’est ouvert le 27 janvier 59 dans un contexte international tendu par la crise de Berlin. Berlin-Ouest, au cœur même de la RDA, était un témoin de l'écart économique qui se creusait entre l'Est et l'Ouest, extrêmement visible pour la population. Elle était aussi pour les Occidentaux une base de propagande et d'action secrète qui exaspérait les dirigeants est-allemands. Mais du fait de son caractère indéfendable militairement, Berlin-Ouest était le point faible des Occidentaux. A l’automne 1958, les soviétiques avaient cru à une action imminente, économique, voir militaire, de la RFA contre la RDA. Côté soviétique, on avait décidé de réagir par une contre-attaque politique de grande envergure sur le thème d’un règlement de paix définitif en Allemagne. Le 10 novembre 58, Khrouchtchev demanda aux occidentaux d’évacuer Berlin Ouest, qui devrait devenir une entité indépendante, une ville libre. Le 27 novembre, il appuya sa demande par un ultimatum : les occidentaux devaient évacuer leur secteur de Berlin dans les six mois, sinon l’URSS signerait un traité de paix séparé avec la RDA et renoncerai à ses responsabilités à Berlin et sur les voies d’accès à cette ville. Les occidentaux devraient alors négocier directement avec les Allemands de l’est, devenu pleinement souverains pour les conditions d’accès à Berlin. L’ultimatum du 27 novembre souhaitait mettre un terme à une situation qui menaçait la stabilité de la RDA. Face à l'ultimatum soviétique, les Occidentaux ont fait le choix de la fermeté. Le 31 décembre 1958, les États-Unis ont refusé l'ultimatum soviétique, ils ont tout de même accepté la possibilité d’ouvrir des négociations d'ensemble sur la question allemande, pour peu qu'elles ne se déroulent pas sous contrainte d'un ultimatum de délai.

Le congrès s’est donc ouvert dans ce contexte, un an avant la date statutaire prévue. Khrouchtchev a présenté un rapport introductif de six heures et a fait adopter le plan septennal 1959-1965 annonçant des chiffres grandioses mais inatteignables : ils annonçaient une progression de 85 à 88 % de l’industrie lourde (soit 12 % par an), de 62 à 65 % de l’industrie légère (soit 9 % par an), de 70 % de la production agricole (soit 10 % par an), de 62 à 65 %, du revenu national (soit 9 % par an) et de 40 % du salaire réel. Khrouchtchev a conclu triomphalement : « il est hors de doute que l’accroissement annuel moyen de 8,6 % de la production industrielle, prévu par le plan septennal, sera non seulement obtenu mais dépassé. L’URSS sera donc la plus grande puissance industrielle du monde. D’ailleurs, a-t-il précisé, l’URSS aura achevé la construction complète et définitive du socialisme ».

A ces chiffres utopiques, il a ajouté une menace : l’URSS, a-t-il dit, peut envoyer sur n’importe quel point de la terre depuis son sol des fusées qui ne manqueront pas leur but. Il a démenti enfin les prétendues divergences entre le parti communiste soviétique et le parti communiste chinois.

S’appuyant sur le récent lancement de Luna-1, il a déclaré : « Dans les premiers jours de cette nouvelle année 1959, la première du nouveau Plan, les scientifiques, les concepteurs et les travailleurs soviétiques ont réalisé un nouvel exploit d’importance mondial en lançant avec succès une fusée à plusieurs étages en direction de la lune. Même les ennemis du communisme ont été contraints, face à ces faits incontestables, d’admettre que c’est l’une des plus grandes réalisations de l’ère cosmique. »

Le plan à sept ans était assez ambigu : la priorité annoncée à l’industrie légère (les biens de consommation) n’y était pas clairement affirmée ; l’industrie lourde, c’est-à-dire le complexe militaro-industriel était fort bien servi, avec une prévision de 100% de hausse pour les industries mécaniques. Les dépenses militaires étaient une charge particulièrement lourde pour l’économie soviétique. En valeur absolue et en prix comparable, elles étaient approximativement égales aux dépenses américaines. Mais le produit national brut des Etats-Unis était encore deux fois plus élevé que le P.N.B soviétique. La charge par habitant était encore plus grande, car la population soviétique (225 millions) était 1,2 fois plus nombreuse que celle des Etats-Unis (184 millions), le P.N.B soviétique par habitant n’était égal qu’à 40% du P.N.B correspondant des Etats-Unis. Le poids des dépenses militaires par rapport au P.N.B par habitant, était donc presque 2,5 fois plus grand en URSS qu’aux Etats-Unis. Pour que l’investissement en installations productives puisse garder son importance relative, ce qui était la condition nécessaire pour maintenir les progrès de productivité, il faudrait que ni la consommation privée, ni la construction de logements, ni les dépenses militaires, ni l’aide extérieurs n’augmentent leur part du P.N.B. Or, dans chacun de ces domaines, les besoins étaient immenses.